Sans-abrisme, quel état des lieux ?
Selon les récentes données de la Fondation Abbé-Pierre, la France fait face à une crise croissante du sans-abrisme, le nombre de personnes sans domicile fixe ayant doublé depuis 2012, atteignant actuellement environ 337 000. Cette situation, déjà critique, pourrait s'aggraver avec la crise économique imminente et la menace croissante du chômage.
Malgré l'existence de 145 000 places d'hébergement d'urgence ouvertes toute l'année, le gouvernement prévoit jusqu'à 14 000 places supplémentaires pour les mois d'hiver, laissant de nombreuses personnes sans abri même par temps glacial. Cette insuffisance est particulièrement préoccupante à la lumière du nombre croissant de bébés nés dans la rue, passant de 49 en 2017 à 146 cette année à Paris.
L'espérance de vie alarmante des sans-abri, qui atteint en moyenne 49 ans, bien en deçà de la moyenne nationale de 82 ans, met en évidence les conditions de vie extrêmement précaires auxquelles ces individus sont confrontés. Les principales causes de décès incluent les maladies (36%) et les violences telles que les accidents ou les agressions (27%), avec près d'un tiers des sans-abri décédés souffrant d'addictions, principalement à l'alcool.
Sur le front de l'emploi, un quart des sans-abri ont un travail, souvent précaire et peu qualifié, avec 22% de ces emplois non déclarés. Le secteur du bâtiment, des services à la personne et de l'hôtellerie-restauration est le plus touché.
L'accès limité aux prestations sociales demeure un défi majeur, avec 40% des sans-abri ne bénéficiant d'aucune aide de l'État, parfois en raison de l'inéligibilité liée à l'âge ou à l'absence d'adresse fixe.
Les femmes représentent 38% des sans-abri, mais seulement 5% d'entre elles sont réellement sans abri, préférant souvent recourir à des logements payés par des associations.
Le sentiment de rejet est une réalité pour 83% des sans-abri, tandis que 94% des citoyens expriment le désir d'agir contre cette exclusion massive mais se sentent souvent démunis. Face à cette crise sociale, des initiatives telles que celle d’Entourage ou Seconde Manche cherchent à recréer du lien social via des événements ouverts à tous et des réseaux d'entraide locaux.
Ces données révèlent que le sans-abrisme n'est que la pointe aiguë d'un problème plus vaste de mal-logement en France, touchant jusqu'à 4 millions de personnes, avec un impact considérable sur la vie familiale et la santé. Au total, près de 15 millions de personnes seraient concernées par cette crise du logement à divers degrés.